"Fracking" de François Roux (Editions Albin Michel): le pot de terre contre le pot de fer

Fracking: la fragmentation hydraulique. Qui, au-delà de fragmenter le sol, fragmente les familles et les anciennes amitiés, les plaçant de part et d'autre de la barrière.
Révolte écologique ou logique économique, qui a le plus à y perdre dans cette bataille?
Une histoire, qui, sans être complètement envoûtante, arrive malgré tout à nous embarquer dans une certaine réalité de ce middlewest américain.

Pitch (4ème de couv):
"La guerre, certains en meurent et d'autres en vivent.
Tandis que l'Amérique est en train d'élire Trump, les Wilson se battent dans les vastes prairies du Dakota transformées par l'exploitation providentielle du gaz de schiste. Ils se battent contre le cynisme des géants pétroliers qui intoxiquent leurs champs et leur eau, contre la résignation de ceux qui ont accepté de se laisser acheter et empoisonner."




On sent la poussière du paysage lunaire du Dakota se coller à la peau, on imagine la danse hypnotique de ces grands balanciers au-dessus des puits, et on se prend de plein fouet la chaleur insupportable du soleil qui cuit la peau.  
Dommage que le développement des personnages ne soit pas à la hauteur du travail de l'auteur pour planter le décor avec cette atmosphère étouffante. Car même si l'engagement de Karen et celui de Lisa ne manquent pas de crédibilité, ces personnages n'ont pas la flamboyance d'une Erin Brockovich pour nous embarquer complètement dans la défense de leur cause. De façon générale, tous les personnages ont un potentiel incroyable mais insuffisamment exploité. Les combats du propriétaire contre l'état, de l'engagement écologique et sanitaire contre l'industrie, du pot de terre contre le pot de fer manquent d'envergure et la tension dramatique peine à s'enflammer. 
De la même façon, au-delà de ce fracking, l'auteur passe à la moulinette les autres sujets de fragmentation de la société américaine mais en ne faisant que les survoler: le port d'arme, la religion, la situation des amérindiens, la sexualité, la politique... L’œil est avisé et aguerri, ce dont on pouvait s'attendre d'un auteur qui est aussi réalisateur de documentaires .

Je pense qu'à vouloir être exhaustif dans la description de la société américaine et des choix auxquels elle doit faire face (en prenant comme prétexte le fracking), l'auteur en a délaissé la narration. Ou alors peut-être aurait-il du prendre le parti de faire un roman plus consistant quitte à rajouter quelques centaines de pages supplémentaires, lui permettant de développer tous ces axes.

Fracking restera malgré ces "critiques" un agréable moment de lecture. Ça me fait juste un peu rager de penser, qu'à quelques choix d'écriture près, ça aurait pu être un gros coup de cœur!

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