"Il reste la poussière" de Sandrine Collette (Editions Denoel): le bon, la brute et le truand

Vous connaissez cette sensation, à la plage, lorsque le sable colle à votre peau, vous brûle, vous gratte, vous rend impatient de retourner dans l'eau pour vous en débarrasser? Et bien l'immersion dans ce livre est tellement forte que la terre de Patagonie  vous suit, vous pique les yeux, vous rentre dans la gorge jusqu'à vous faire tousser. Que vous soyez en train de lire ce roman dans votre lit ou dans votre bain, la sensation ne vous lâche pas... et pourtant vous aurez envie d'y replonger chaque jour, un peu plus. 

Pitch (4ème de couv):
Patagonie. Dans la steppe balayée de vents glacés, un tout petit garçon est poursuivi par trois cavaliers. Rattrapé, lancé de l'un à l'autre dans une course folle, il est jeté dans un buisson d'épineux.
Cet enfant c'est Rafael, et les bourreaux sont ses frères aînés. Leur mère ne dit rien, murée dans un silence hostile depuis cette terrible nuit où leur ivrogne de père l'a frappée une fois de trop. Elle mène ses fils et son élevage d'une main inflexible, écrasant ses garçons de son indifférence. Alors, incroyablement seul, Rafael se réfugie auprès de son cheval et de son chien.
Dans ce monde qui meurt, où les petits élevages sont remplacés par d'immenses domaines, l'espoir semble hors de portée. Et pourtant, un jour, quelque chose va changer. Rafael parviendra-t-il à desserrer l'étau de terreur et de violence qui l’enchaîne à cette famille?"




Ce roman donne soif. Incroyablement. 
Car tout est aride.

Bien sur le décor déjà. Une steppe patagonienne sèche, hostile, au sein de laquelle vient se nicher l'estancia, isolée, loin de la ville et des Autres.
Et puis la vie qu'on y mène. Un travail harassant, qui laisse des séquelles physiques et psychologiques sur cette famille. Entre la morsure du froid, les ampoules sur les mains qui s'impriment à chaque nouvelle tonte, les corps tout entier ploient sous la lourdeur et l'épuisement au travail. 
Et les personnage aussi. Rendus secs par "évaporation" de tout sentiments, hormis la rancoeur, la colère et la peur. Avec en maître d'orchestre une mère qui mène la vie dure à ses fils, voyant cela comme une façon de les préparer à la réalité de la vie. Alors Joaquin et Mauro, les deux jumeaux aînés, ne se font pas prier pour appliquer le précepte de leur mère sur les plus jeunes frères. Steban est tellement rongé par l'angoisse de cette vie et du traumatisme laissé par le "départ" du père qu'il n'arrive pas à aligner deux mots pour en faire une phrase. Il est traité comme un idiot. Rafael, le petit dernier, est le soufre-douleur, accusé d'être de trop dans cette fratrie qui arrive à peine à subvenir à ses besoins. Obligé de subir un huis-clos de violence alors qu'il n'aspire qu'à la liberté.

Un terrible roman où l'ambiance est soigneusement travaillée par une auteure visiblement inspirée. Le lecteur n'arrive pas à se défaire de cette terre, de cette rugosité et finit par trembler avec le petit. Et rêver, aussi, beaucoup, à une lueur d'espoir dans ce tas de poussière.

Un western familial âpre, qui laissera forcément une trace de morsure indélébile sur tous les lecteurs venus s'aventurer dans ses pages. Chapeau (de cow-boy!!!.... je sais, mais fallait bien que je place mon jeu de mots pourri) Madame Collette!

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