"Le couteau" de Jo Nesbo (Editions Gallimard): le duo Jo/Harry porté à son paroxysme

[ALERTE SPOIL]
Je culpabilise Harry. Vraiment beaucoup. En me rappelant mes dernières paroles après ta dernière traque, celle du Vampiriste: "Tu sais que tes absences entre deux apparitions me rendent folles? Tu sais que je te déteste parfois de me laisser tomber aussi longtemps? De n'avoir d'attentions que pour Rakel? "
Je me vois désormais comme une sorcière maléfique, ayant précipité la fin de ta bien-aimée par cette formule jalousie-magique. Et faisant s'arrêter de battre son demi-cœur dans ta poitrine. 
Je m'en veux. Et pourtant y'a pas photo Harry: même à moitié mort, tu restes le boss!

Pitch (4ème de couv): 
"Harry Hole a réintégré la police criminelle d'Oslo, mais il doit se contenter des cold case alors qu'il rêve de remettre sous les verrous Svein Finne, ce violeur en série qu'il avait arrêté il y a une dizaine d'année et qui vient d'être libéré.
Outrepassant les ordres de sa supérieure hiérarchique, Harry traque cet homme qui l'obsède. Mais un matin, après une soirée bien trop arrosée, Harry se réveille sans le moindre souvenir de la veille, les mains couvertes du sang d'un autre. 
C'est le début d'une interminable descente aux enfers: il reste toujours quelque chose à perdre, même quand on croit avoir tout perdu."


Harry, créature de Frankenstein de Jo Nesbo. Des cicatrices au corps et à l'âme, cousu d'alcool et rempli de détermination. Son créateur lui faisant vivre des expériences borderline, repoussant sans cesse ses limites. Un duo aussi sombre qu'efficace.

Mais cette fois Jo Nesbo tente l'expérience ultime en précipitant Harry au fond du ravin, décidant de tuer celle qui est la seule à avoir réussi à donner un sens à sa vie: son amour, sa Rakel. Les premiers chapitres nous mettent au diapason du choc d'Harry Hole découvrant le corps de Rakel dans une flaque de sang. L'impression d'un poids qui nous écrase la poitrine avant que n'arrivent par vagues le déni, la colère et la tristesse. Mais là où le lecteur tente tant bien que mal d'accepter l'inconcevable, chez Harry les étapes du deuil sont squeezées par une rage permettant à son cerveau de se déconnecter des émotions, de cette perte impossible à surmonter. Avec un objectif avant de s'autoriser à s’effondrer complètement: trouver le meurtrier. 

Mais là encore, Jo Nesbo ne facilite pas la tache d'Harry dans son enquête. Et telle une balle de squash, il l'envoie se prendre un premier mur ... Mais sa rage le relève et l'envoi reprendre de l'élan pour explorer une deuxième direction et bim! Deuxième mur! Entêté et anesthésié par l'alcool, il tente de faire face et de repartir pour une autre piste et paf! Troisième échec! Jusqu'à ce que finisse par fissurer cette grande carapace dégingandée, obligeant Harry à regarder en lui-même, se désigner coupable et s'autodétruire.

Alors oui, ce roman est encore une réussite... et mérite THE FAMOUS Baignoire d'Or! 
Le combo Nesbo/Hole plus noir que jamais fonctionnant en symbiose au point que l'on vient à se demander qui de la créature ou du créateur nourrit les ténèbres de l'autre.
L'expérience ultime ayant été menée avec ce roman, je suis curieuse de savoir comment va se réinventer ce duo infernal dans le prochain roman et s'il pourra jamais atteindre le paroxysme d'émotions contenu dans cette enquête.

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