"Les Soeurs Brontë - La Force d'exister" de Laura El Makki (Editions Tallandier): Charlotte, Emily et Anne, le tiercé gagnant.. mais dans quel ordre?

Les Hauts de Hurlevent. Premier roman coup de cœur alors que j'étais toute jeune lectrice. Roman lu et relu depuis et pourtant je n'avais jamais cherché jusque-là à rencontrer l'auteure derrière ce chef-d'oeuvre de noirceur. Ni sa fratrie. 
Du moins, ma connaissance s'en limitait aux banalités de "malédiction" qui tua les enfants Brontë les uns après les autres et de parutions sous pseudonymes masculins. Emily la discrète, Charlotte l'effrontée... Quid des autres? 

Cette biographie met l'éclairage sur la synergie créatrice au sein de cette famille, impulsé par le Père, qui favorisera l'émergence de talents et d’œuvres qui encore aujourd'hui résistent à l'épreuve du temps, touchant au-delà des frontières des générations de lecteurs.


Pitch (4ème de couv):
"Haworth, 1836. Dans les landes du Yorkshire, Charlotte (20 ans), Emily (18 ans) et Anne (16 ans) écrivent à la lumière de la bougie. Comment ces jeunes femmes de condition modeste, sans relations ni entregent, vont-elles devenir des auteurs qui comptent? Quel rôle tient leur frère Branwell, artiste raté, dans cette fratrie à la fois soudée et rongées par les non-dits?"




Laura El Makki semble vouloir rétablir quelques vérités dans cette biographie et remettre les pendules à l'heure. Ou plutôt remettre les sœurs à leur juste place. A plusieurs reprises elle n'hésitera d'ailleurs pas à accabler Elizabeth Gaskell, auteure contemporaine des Brontë mais surtout première biographe de Charlotte qui selon elle, travestit une partie de l'histoire. Sans avoir lu cette première biographie, mais ayant tenté de lire Nord et Sud de Mme Gaskell sans succès (insipide!), j'ai envie d'accorder du crédit à la démarche de Mme El Makki.

Cela passe par la réhabilitation du chef de clan, Patrick Brontë, qui n'est pas le tyran décrit communément mais un homme de son époque qui a élevé et dû prendre seul des décisions. Il a tenté d'offrir une éducation à tous, malgré leur pauvreté, en favorisant certes son seul fils, à travers lequel il imaginait un grand avenir d'artiste peintre. Des choix lié à l'époque surtout où les femmes, d'autant plus des femmes pauvres, étaient cantonnées à se marier et/ou à n'être que des subalternes.
Laura réhabilite également la place et le talent de la petite dernière, Anne, toujours décrite comme la troisième roue du carrosse Brontë. La première à avoir fini un roman, mais malheureusement pas la première à le publier. Si les circonstances et les paroles de Charlotte avaient été bienveillantes, peut-être que son destin aurait été tout autre, qui sait.
Oui, Charlotte, la rebelle, la frustrée,  saisira les opportunités ou plutôt les provoquera, quitte à bouleverser leur équilibre, pour faire éclater à travers leurs talents à toutes, prioritairement le sien. Serait-elle allée jusqu'à détruire des œuvres inconnues d'Emily? Est-ce de la maladresse ou du calcul que d'établir une hiérarchie des talents de ses sœurs lors de l'écriture des préfaces des rééditions de leurs romans à titre posthume? En décrivant Emily comme flamboyante, et Anne comme une personnalité morne?

Dans le huis-clos du presbytère, à l'ombre des regards extérieurs, entre fraternité, soutien et lutte pour exister, les secrets et ambitions des sœurs Brontë resteront à jamais bien gardés. Et nulle biographie ne pourra jamais en révéler la vérité.

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