"Les mal-aimés" de Jean-Christophe Tixier (Editions Le Livre de Poche): et pourquoi ce désespoir caché au fond de ce roman

Découvert avec son deuxième roman, Effacer les hommes (que j'aurais aimé voir remporter le Prix du Livre France Bleu/Page des Libraires soit dit en passant et en qualité de jurée…), Jean-Christophe Tixier continue de m'intriguer avec son écriture magnétique à l'atmosphère ciselée. Mais avec ce roman, pas la moindre étincelle d'espoir. Tout est noir, très noir alors que l'auteur décide de faire de la part sombre de notre Histoire, les bagnes pour enfants, le terrible thème de son roman.

Pitch (4ème de couv):
"1884, aux confins des Cévennes. Une maison d'éducation surveillée ferme ses portes et des adolescents décharnés quittent le lieu sous le regard des paysans qui furent leurs geôliers. Quand, dix-sept ans plus tard, sur cette terre reculée et oubliée de tous, une succession d'évènements étranges se produit, chacun se met d'abord à soupçonner son voisin. On s'accuse mutuellement du troupeau de chèvres décimé par la maladie, des meules de foin en feu, des morts qui bientôt s'égrènent… Jusqu'à cette rumeur, qui se répand comme une traînée de poudre: "Ce sont les enfants qui reviennent.""


Âpre, âcre, acide, amer. Ne recherchez pas la douceur du sucre dans Les Mal-Aimés. Où il est question de fantômes de gamins abusés, maltraités, dont les cadavres ont fait l'objet de beaucoup moins de d'attention que ceux d'une chèvre, revenant hanter la mémoire des habitants. 
Ce bagne pour enfants, même fermé depuis presque vingt-ans, reste une menace pour tous. Une ombre leur rappelant avoir pris part à l'ignominie, en tant que bourreaux ou spectateurs muets de ce qu'il s'y est passé. Et il suffit de la mort suspecte d'un cheval, pour que les secrets et les crimes étouffés depuis des années, attisés par la superstition, s'embrasent et obligent à remuer la merde du passé. La peur et la mort rendant enfin justice et un semblant d'humanité à ces gamins.

Jean-Christophe Tixier maitrise à perfection l'écriture du décor de son roman, qui sert l'atmosphère plombante de son roman, coupant ce hameau du reste du monde dans un hui-clos aux allures de fin du monde. Il a l'art de faire des bâtisses, des falaises et des fôrets des limites naturelles qui retiennent les Hommes plus sûrement que quatre murs. Il est aussi sans concession avec les personnages dévoilant leur lâcheté, leur violence, leur petitesse et même parfois leur ridicule. 

Une histoire plus noire que noire, qui plaira aux adeptes du genre mais pourra faire fuir les autres lecteurs, au regard de la sensation pas toujours confortable de se faire aspirer dans un puit sans fond. Et les extraits des registres du centre d'éducation surveillé de l'Hérault, bien réels ceux-ci, pourront renforcer ce malaise.

Pour ma part, je reste séduite par l'écriture de Jean-Christophe Tixier, même si j'ai été bien plus emballée par Effacer les Hommes. J'attends désormais le troisième! Mr Tixier, si vous m'entendez…

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